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 Les deux Grenouilles d'Or

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Avy
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Avy


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MessageSujet: Les deux Grenouilles d'Or   Les deux Grenouilles d'Or Icon_minitimeVen 15 Sep 2017 - 0:08

Contes du magicien et du sorcier.
Dominique CAMUS

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Les deux Grenouilles d'Or


Il y avait une fois un magicien et une magicienne. Il n'avaient pas d'enfants et ils désiraient en avoir. Un jour que le magicien était à la chasse, il rencontra au fond d'un bois une biche qui était tétée par deux petits enfants. Il n'osa pas faire feu sur elle, de crainte de tuer les enfants. Mais, la biche s'enfuit quand elle l'aperçut, et il emporta les deux innocentes créatures à son château.
- Voyez, femme, dit-il en arrivant, ce que j'ai trouvé dans le bois.
- Oh, les charmants petits enfants !, s'écria la magicienne en les voyant. Garçon et fille. La fille sera à moi et le garçon à vous.

Et les voilà heureux. Chacun d'eux élève et instruit son enfant à sa guise. La fille était plus intelligente que le garçon et apprenait facilement tout ce qu'on lui montrait. On leur enseignait des choses épouventables.
La magicienne n'aimait pas le garçon, qui se nommait Arzur, et ne lui voulait aucun bien. La fille avait pour nom Azénor.
Azénor aimait son frère et elle lui dit un jour :
- Nous sommes frère et soeur, mais nous ne sommes pas les enfants du maître et de la maîtresse de ce château. Le magicien, un jour qu'il chassait dans la forêt, nous y a trouvés qui tétions une biche et nous amena à sa femme. La magicienne ne t'aime pas et elle ne cherche qu'à se débarasser de toi. Elle t'imposera des épreuves très difficiles et des travaux, que tu devras accomplir sous peine de mort. Ne t'en effraie pas trop, mais fais de tout point ce que je te dirai et je te tirerai de l'embarras. J'ai étudié des livres de magie, et j'en sais déjà plus long qu'elle. Demain, elle t'enverra abattre un bois de plus de cent journaux de terre avec une cognée de bois. Bien plus, tu devras faire des cuillères avec tout le bois et en avoir fini avant le coucher du soleil, autrement, tu seras mis à mort. Mais, rassure-toi, prends cette baguette, et quand tu serais dans le bois, il te suffira d'en frapper le tronc d'un vieux chêne de plus de mille ans que tu verras tout au bout de la grande avenue, en disant : « Par la vertu de ma baguette, vieux chêne, abats-toi ! » Et aussitôt le chêne tombera sur l'arbre le plus voisin et le renversera sur un autre, lequel tombera sur un autre et ainsi de suite, jusqu'à ce que tout le bois tombe par terre. A midi, la magicienne ira voir où tu en seras de ta besogne, et quand elle verra tout son bois abattu, elle ne sera pas contente. Elle te dira : « Et les cuillères ? Il faut que tout ce bois soit façonné en cuillères avant le coucher du soleil, ou il n'y a que la mort pour toi. » Et elle s'en ira là-dessus. Aussitôt qu'elle sera partie, tu toucheras du bout de ta baguette le tronc du vieux chêne et diras : « Par la vertu de ma baguette, que tout ce bois se convertisse en cuillères ! » Et ce sera aussitôt fait.

Le lendemain matin, la magicienne dit à Arzur, en lui présentant une cognée de bois :
- Prends cette cognée et va m'abattre le bois qui entoure le château, et que pas un arbre ne reste debout ! Tu feras aussi des cuillères avec le bois, et il faut que tout cela soit terminé pour le coucher du soleil, ou il n'y a que la mort pour toi.
Arzur se rendit au bois, assez peu rassuré malgré les paroles de sa sœur. Il trouva facilement le vieux chêne et s'arrêta à le considérer, sans oser le frapper. Enfin il se décida, et, au premier coup de cognée, le vieux chêne tomba sur le chêne le plus voisin, celui-ci tomba sur un autre et ainsi de suite, si bien que tout le bois fut par terre en un moment.
Arzur retourna alors au château en sifflant, et tout fier de sa besogne.
- Eh bien, dit la magicienne, en le voyant revenir, que viens-tu faire ici ?... Et la besogne ?
- C'est fini, répondit-il tranquillement.
- Tu mens, ce n'est pas possible.
- Venez voir si vous ne me croyez pas.
Elle le suivit au bois, et, quand elle vit tous ses beaux arbres par terre, sa colère fut grande.
- Quel malheur, s'écria-t-elle, de si beaux arbres ! Mais, je t'avais dit de faire des cuillères avec tout le bois.
- Oui, mais vous m'avez donné pour cela jusqu'au coucher du soleil. Soyez tranquille, vous aurez vos cuillères pour souper.
Et la magicienne s'en alla là-dessus en grommelant.
Dès qu'elle fut partie, Arzur toucha de sa baguette le tronc du vieux chêne et dit :
- Par la vertu de ma baguette, que tout le bois qui est par terre soit converti en cuillères.
Et aussitôt tout se mit en mouvement : les branches et les troncs se convertissaient d'eux-mêmes en cuillères, et une montagne de cuillères s'éleva bientôt jusqu'au ciel.
Au coucher du soleil, la magicienne revint, et, voyant tout son bois converti en cuillères, elle s'écria en écumant de fureur :
- Ah, malheur, malheur ! Un si beau bois mis en cuillères ! Et que ferais-je de cette montagne de cuillères ?
- Je n'ai fait que vous obéir, lui répondit Arzur. Vous m'aviez demandé des cuillères et j'espère que vous en avez làpour toute votre vie.
- Tu n'as pas fait tout ceci toi-même, et seul ! Il faut que tu aies été aidé, mais, n'importe !Demain je te donnerai un autre travail et nous verrons bien si tu t'en tires aussi facilement.
Et ils revinrent au château, la vieille de mauvaise humeur, grommelant et méditant une revanche.

Le lendemain matin, elle dit à Arzur :
- Nous devons nous absenter pendant quelques jours mon mari et moi, pour aller voir un de nos amis. Azénor viendra aussi avec nous, mais comme il nous faut traverser un bras de mer et que nous n'avons pas d'embarcation, tu nous construiras au-dessus de l'eau un pont de plumes sur lequel nous passerons en voiture. Et malheur à toi, si le pont n'est pas fait à temps, car autrement il n'y a que la mort pour toi !
- C'est bien, ce sera fait, répondit Arzur tranquillement, quoiqu'il ne fut pas très rassuré.
Et il se rendit auprès de sa sœur et lui fit connaître la nouvelle épreuve qu'on lui imposait.
- Voici ce qu'il faudra faire, lui dit Azénor, écoute bien ! Je me dirai malade pour ne pas les accompagner et rester à la maison avec toi. Tu les accompagneras jusqu'à la mer pour leur construire le pont sur lequel ils devront passer. Tu n'auras qu'à frapper l'eau de ta baguette en disant : « Par la vertu de ma baguette, qu'il s'élève ici un pont de plumes pour traverser la mer en voiture ! » Aussitôt le pont paraîtra. La magicienne, étonnée, t'invitera alors à monter dans la voiture et à les accompagner, mais, garde-t-en bien et retourne vite au château dès qu'ils se seront engagés sur le pont, puis nous aviserons aux moyens de nous enfuir d'ici.

Le lendemain matin, quand il fut question de partir, Azénor resta au lit et se dit bien malade. La magicienne s'en montra très contrariée.
Elle partit néanmoins avec son mari et Arzur. Quand ils furent au bord de la mer :
- Alons, dit la magicienne à Arzur, il nous faut là sur-le-champs un pont de plumes pour passer de l'autre côté.
- Ca va être fait à l'instant, répondit tranquillement le jeune homme.
Et, s'étant avancé jusqu'au bord de l'eau, il frappa de sa baguette en disant :
- Par la vertu de ma baguette, qu'il s'élève ici un beau pont de plumes, pour passer de l'autre côté de la mer !
Et le pont parut aussitôt.
La magicienne pensa à part soi : « Il est aussi magicien. Il aura sans doute trouvé et étudié mon petit livre rouge et il en sait déjà aussi long que moi, il est grand temps de nous débarrasser de lui. Il faut qu'il vienne avec nous sur le pont et nous le jetterons à la mer. »
Mais elle dissimula et dit :
- C'est fort bien, mais venez avec nous, car nous pouvons encore avoir besoin de vos services. Entrez le premier sur ce beau pont que vous venez de nous construire, et montrez-nous le chemin, nous vous suivrons.
- Je n'en ferai rien, répondit Arzur, je veux vous laisser l'honneur d'être les premiers à mettre les pieds sur mon pont, mais ne craignez rien, je vous suivrais de près.
Après quelques autres façons et compliments, la magicienne et le magicien passèrent les premiers. Aussitôt Arzur, d'un coup de sa baguette magique, coupa entre eux et la terre et courut rejoindre sa sœur.

- Partons vite à présent, lui dit Azénor, et ne perdons point de temps, car ils ne tarderont pas à revenir ! Mais il nous faut d'abord, pour l'empêcher de sonner, remplir d'étoupe la grande cloche qui est sur la plus haute tour et qui donne l'alarme aussitôt que quelque chose d'extraordinaire arrive au château, et elle se fait entendre à sept cents lieues à la ronde.
La corde de cette cloche est attachée au pied du dromadaire du magicien, qui est dans son écurie et la tire quand il veut avertir son maître que quelque chose d'extraordinaire se passe chez lui.
Et ils coururent à la cloche et la remplirent avec de l'étoupe et des tapis. Puis, il chargèrent leurs poches d'or et de pierres précieuses, descendirent à l'écurie et y prirent les deux meilleurs chevaux. Au moment de partir, Azénor dit à Arzur :
- J'allais oublier un point important. Descend vite et prends à l'écurie l'étrille, la brosse et le bouchon de paille qui servent au pansage de nos chevaux. Ils nous seront utiles dans notre fuite.
Arzur apporta l'étrille, la brosse et le bouchon de paille, et, à un signal donné, leurs chevaux s'élevèrent alors dans les airs et partirent avec la rapidité de l'oiseau. Ils avaient sept cent lieues à faire pour sortir du domaine du magicien, qui perdait alors tout pouvoir sur eux.
Quand ils furent à environ cinq cent lieues, la cloche se fit entendre. Le dromadaire, à force de tirer la corde, avait fini par faire tomber l'étoupe et les tapis qui la bouchaient.
- Voilà la cloche qui sonne ! dit Azénor. Le magicien et la magicienne vont se hâter de rentrer chez eux et se mettre à notre poursuite. Heureusement, nous avons une bonne avance sur eux !
Et ils pressèrent leurs chevaux, afin de gagner du terrain.

Le magicien et la magicienne étaient accourus au son de la cloche. Ils se hâtèrent d'aller consulter leurs livres de magie. Mais, hélas, Azénor les avait emportés, hors un seul, et ce n'était pas le meilleur. La magicienne dit au magicien :
- Montez vite sur le dromadaire, emmenez aussi le lévrieret tâchez de les atteindre et de les ramener ! Ils voyagent en l'air, mais ils descendront à terre. A environ cinq cents lieues d'ici, vous verrez une belle fontaine pavée de pierres d'or, avec une margelle et une voûte en pierres d'argent et deux grenouilles d'or au fond de l'eau. Les deux grenouilles d'or sont eux-mêmes, leurs chevaux ont été métamorphosés en l'eau de la fontaine, et l'or et les pierres précieuses qu'ils ont emportés sont devenus les pierres d'or et d'argent de la fontaine et les feuilles des arbres qui sont autour. Partez vite, et ne revenez pas sans eux !
Et le vieux magicien partit, monté sur son dromadaire qui passa comme l'éclair et suivi de son lévrier.
Au même moment, Azénor disait à Arzur :
- Le magicien et la magicienne sont rentrés chez eux et ils sont furieux de notre départ, mais surtout de la disparition de leurs livres de magie, que j'ai emportés. J'entends la magicienne qui dit au magicien de monter sur son dromadaire et de se mettre à notre poursuite. Elle ajoute qu'il nous trouvera sous la forme de deux grenouilles d'or, au fond d'une fontaine. Mais je saurai faire en sorte qu'il oublie les conseils et les recommandations de sa femme. Il va plus vite que nous et nous atteindra bientôt. Regarde derrière toi si tu ne vois rien venir.
- Je vois au loin, et venant comme la foudre, un lévrier, suivi du magicien sur son dromadaire.
- Descendons à terre alors.
Ils descendirent à terre et aussitôt leurs chevaux se trouvèrent métamorphosés en fontaine, leurs trésors en pierres d'or et d'argents et en feuilles jaunes et blanches dans les arbres autour de la fontaine, et eux-même en grenouilles d'or au fond de l'eau.

Le magicien arriva un moment après, et, apercevant cette belle fontaine qu'il ne connaissait point, il descendit pour l'admirer.
- Comme c'est beau ! se disait-il. Je ne savais pas posséder une semblable merveille sur mes terres.
Et, apercevant les deux grenouilles d'or au fond de l'eau :
- Oh, les jolies petites grenouilles ! On dirait qu'elles sont d'or : si je pouvais les prendre pour les porter à ma femme !
Et il entra dans l'eau et essaya de prendre les grenouilles, mais elles lui échappaient toujours au moment où il croyait mettre la main dessus.
Impatienté et voyant que tous ses efforts étaient inutiles, il se décida à retourner chez lui, ayant complètement oublié le but de son voyage. En le voyant revenir seul, sa femme lui dit :
- Eh bien, vous ne les avez donc pas trouvés que vous revenez seul ?
- Non, je ne les ai pas vus, répondit-il, se rappelant vaguement ce dont il s'agissait.
- C'est de votre faute alors, mais qu'avez-vous remarqué d'extraordinaire ?
- Rien, si ce n'est pourtant une belle fontaine que je ne connaissais pas, pavée et entourée de pierres d'or et d'argent, avec des arbres autour portant des feuilles d'or et d'argent qui brillaient au soleil, et deux petites grenouilles d'or au fond de l'eau. Je n'ai jamais rien vu de si beau. J'ai bien essayé de prendre les deux grenouilles d'or pour vous les apporter, mais je n'ai pas puet je m'en suis retourné.
- Vous n'avez donc tenu aucun compte de mes recommandations ! dit la magicienne en colère : ces deux grenouilles d'or étaient précisément ceux que vous poursuiviez, comme je vous l'avais dit, et il ne fallait pas vous en revenir avant de les avoir prises.
- Ma foi, j'avais complètement oublié ce que vous m'aviez dit à ce sujet, répondit le vieux magicien.
- Eh bien, reprenez vite la poursuite et ne revenez pas sans eux. Cette fois, quand ils vous verront arriver, leurs chevaux seront métamorphosés en deux beaux arbres. L'or, l'argent et les pierres précieuses qu'ils emportent deviendront feuilles sur ces arbres, et eux-même seront changés en deux petits oiseaux qui chanteront sur les branches. Retenez bien ce que je viens de vous dire et partez bien vite et ramenez-les-moi !

Et le vieux magicien se remit en route, sous la forme d'un nuage, cette fois.
Arzur et Azénor n'avaient pas perdu de temps aussi.
- J'entends la magicienne, dit Azénor, qui est en colère et gronde le magicien : elle l'envoie de nouveau à notre poursuite et lui dit sous quelle forme il doit nous trouver, mais je saurai lui faire oublier encore ses recommandations et ses conseils et il lui faudra de nouveau s'en retourner sans nous. Regarde si tu ne le vois pas venir, car il va avec la rapidité de l'éclair.
- Je vois un grand nuage noir qui s'avance rapidement sur nous, répondit-il.
- C'est lui, descendons à terre.
Et il descendirent, et en touchant terre, les deux chevaux se trouvèrent aussitôt changés en deux beaux arbres au feuillage d'or et d'argent, et sur les branches chantaient deux charmants petits oiseaux.
Le nuage arriva sur eux.
- Voilà, dit le magicien, les deux arbres que m'a indiqués ma femme.
Et il descendit aussi à terre. Mais, il fut tellement charmé par le chant des deux oiseaux qu'il s'arrêta à les écouter, la bouche béante, immobile comme une statue, et oublia complètement les recommandations de sa femme.
Au coucher du soleil, il dit enfin :
- Voilà le soleil qui se couche, il est temps de rentrer.
Et il s'en retourna.
En le voyant revenir encore seul, la magicienne s'écria :
- Comment vous revenez encore seul ?
- Oui, je ne les ai pas vus, répondit-il tout confus.
- Qu'avez-vous vu d'extraordinaire ?
- Je n'ai rien vu d'extraordinaire, si ce n'est pourtant deux beaux arbres au feuillage d'or et d'argent, et sur les branches étaient deux charmants petits oiseaux qui chantaient si mélodieusement que je n'ai jamais rien entendu de si beau.
- Et vous avez perdu votre temps à les écouter et vous avez oubié tout ce que je vous avais dit !
- Ma foi, oui, je ne m'en suis plus souvenu.
- Eh, c'étaient eux, ces oiseaux ! Je vous l'avais dit... Décidément, vous êtes un triste magicien et je ne puis plus rien attendre de bon de vous. Je vais partir moi-même à leur poursuite et je saurai bien les atteindre et les ramener, moi, bien qu'ils soient près de sortir de nos terres.

Et elle partit aussi, sous la forme d'un nuage noir avec tonnerre, éclairs et un vacarme épouventable.
Cependant, les deux fugitifs forçaient leurs chevaux et approchaient des limites des terres du magicien.
- Cette fois, dit Azénor, c'est la magicienne elle-même qui viendra et elle est bien en colère. Regarde derrière toi si tu ne vois rien venir.
- Je vois un gros nuage noir qui s'avance sur nous avec tonnerre, éclairs et un vacarme épouventable.
- C'est elle ! Hâte-toi de jeter à terre le bouchon de paille que tu as emporté de l'écurie.
Arzur jeta le bouchon de paille, et aussitôt une infinité de meules de paille, très grandes et très hautes, s'élevèrent derrière eux et arrêtèrent le nuage.
Mais la magicienne se métamorphosa en épervier et passa. Puis, aussitôt elle redevint nuage et continua sa poursuite sous cette forme.
- Regarde encore derrière toi, dit Azénor à son frère, que vois-tu à présent ?
- Je vois encore le nuage noir qui s'avance rapidement et qui tonne et lance des éclairs d'une façon effrayante.
- Jette vite la brosse à terre ! C'est encore la magicienne.
Il jeta la brosse, et aussitôt un grand étang se forma derrière eux. Le nuage arrêté un moment, se mit à pomper l'eau tant et si bien qu'il dessécha l'étang et passa. Mais il s'en trouva alourdi et retardé dans sa marche.
- Regarde encore derrière toi : que vois-tu ?, demanda Azénor.
- Je vois le nuage qui s'avance toujours sur nous, plus noir et plus menaçant et lançant du feu d'une façon effrayante.
- C'est toujours la magicienne : jette l'étrille à terre !
Arzur jeta l'étrille et une grande ville se montra aussitôt derrière eux, avec des maisons et des tours élevées qui contrarièrent beaucoup la marche du nuage. Cependant il continuait d'avancer avec tonnerre, éclairs et un vacarme épouventable.
- Regarde encore derrière toi : que vois-tu à présent ?
- C'est toujours le nuage qui s'avance sur nous. Il es très près, il va nous atteindre !
- Nous aussi nous approchons, rassure-toi.

Et au même instant, ils franchirent un bras de mer et descendirent à terre sous leur forme naturelle. Ils étaient sortis de dessus les terres du magicien et n'avaient plus rien à craindre de lui ni de sa femme. Celle-ci, retenue de l'autre côté de l'eau, qu'elle ne pouvait franchir, tempêtait, grinçait des dents et leur montrait le poing en criant :
- Ma malédiction sur vous, et puisse le tonnerre vous écraser ! Ce qui me fait enrager, c'est que vous m'avez enlevé mon petit livre rouge qui contient toute ma science !
- Oui, dit Azénor, en lui montrant le livre, le voici, et je me moque de vous à présent !
Et ils riaient de sa fureur et la narguaient.
La vieille sorcière, ne pouvant aller plus loin, s'en retourna, toujours sous la forme d'un nuage noir tonnant, lançant du feu et détruisant tout sur son passage.
Les deux jeunes gens s'éloignèrent aussi, tranquillement et sans crainte désormais. Ils entrèrent dans un grand bois où la nuit les surprit. Ils se firent un lit avec des herbes et des feuilles sèches contre le tronc d'un vieux chêne et s'endormirent facilement, car ils étaient fatigués.

Azénor s'éveilla au point du jour, et, frappant la terre avec sa baguette magique, elle dit :
- Par la vertu de ma baguette, je veux qu'un beau château s'élève ici, instantanément, orné et meublé comme le palais d'un roi, et que mon frère et moi nous nous trouvions couchés chacun dans son lit, dans une belle chambre toute resplendissante d'or et de pierres précieuses.
Ce qui fut fait sur-le-champ.
Quand Arzur s'éveilla, il fut bien étonné de se trouver dans un lit de plume et une belle chambre si richement ornée, après s'être couché sur un lit de feuilles et d'herbes sèches dans un bois. Puis, remarquant Azénor dans un autre lit près du sien, il lui demanda :
- Que signifie tout ceci, Azénor ? Où sommes-nous ici ? Je rêve, sans doute.
- Non, répondit-elle, tu ne rêves pas et tout ce que tu vois est la réalité même. J'ai emporté le petit livre rouge et la baguette magique de la magicienne, et pendant que nous les aurons, nous pourrons satisfaire tous nos désirs et nos caprices.
Ils se levèrent, trouvèrent dans la salle à manger une table chargée des mets et des fruits les plus exquis, et déjeunèrent, servis par des mains invisibles. Puis ils visitèrent les chambres du château, toutes plus belles les unes que les autres et remplies de parures et de trésors de toutes sortes. Les jardins aussi étaient magnifiques, avec de belles fleurs aux parfums délicieux et des fruits exquis de toutes sortes, un vrai paradis terrestre. Azénor dit à Arzur qu'il pouvait s'y promener et chasser à loisir (car le gibier y abondait), mais qu'il ne devait jamais en sortir, ou il lui arriverait malheur.

Ils passèrent quelques temps dans ce château, heureux et ne manquant de rien.
Mais un jour, Arzur franchit la clôture du jardin malgré la défense de sa sœur, et aussitôt il s'enfonça dans une fondrière jusqu'aux aisselles, sans pouvoir en sortir.
Le château disparut aussitôt.
Sa sœur accourut à ses cris et le retira de la fondrière.
Et le château reparut alors.
Mais, à partir de ce moment, Arzur perdit complètement la mémoire du passé : il ne se rappelait plus ni leur séjour dans le château du magicien, ni la fuite et la poursuite avec ses émouvantes péripéties. Il oublia même qu'Azénor était sa sœur et voulut l'épouser et il la poursuivait de ses instances, ce dont elle était très peinée.
Un jour, les deux fils du roi, étant à la chasse dans le boix, se trouvèrent devant le château d'Azénor et furent bien étonnés.
- Qu'est-ce que c'est ce que château-là et qui l'a fait bâtir, car notre père n'en a pas connaissance ? se dirent-ils. Allons voir.
Et ils entrèrent au château. Ils trouvèrent Azénor dans la cour et l'abordèrent poliment et lui demandèrent :
- A qui appartient ce château, Mademoiselle ?
- A moi, Messieurs.
- Qui l'a fait bâtir ?
- Moi-même.
- Et vous n'en avez pas demandé la permission au roi, notre père, étant sur ses terres ?
- Non, je n'ai pas demandé la permission de votre père, je puis m'en passer.
- Le roi ne sera pas content et il fera raser votre château.
- Je ne le crains pas, je l'attends.
Et les deux princes s'en allèrent là-dessus, peu satisfaits de la réception de la jeune châtelaine.
Mais à peine furent-ils sortis de la cour qu'ils tombèrent dans la même fondrière qu'Arzur et s'y enfoncèrent jusqu'aux aisselles, sans pouvoir en sortir.
Et le château disparut encore.
Les princes crièrent au secours. Azénor accourut.
- Tirez-nous d'ici ! lui crièrent-ils.
- Pour que vous alliez dire à votre père de faire raser mon château ?
- Non, on vous laissera votre château.
- Cela ne suffit pas, que me donnerez-vous encore ?
- Je vous épouserai, répondit l'aîné des princes.
- Et mon frère, voulez-vous lui donner aussi la main de votre sœur ?
- Oui, il épousera aussi notre sœur.
Alors Azénor les fit sortir de la fondrière.
Et le château reparut aussitôt.
Puis ils se rendirent tous les quatre ensemble à la cour et racontèrent tout au roi.
Le roi, avant de rien promettre, voulut voir le palais d'Azénor dont on lui racontait tant de merveilles.
Il le visita, fut ébloui, enchanté et approuva les deux mariages.
On fit de nombreuses invitation dans tout le royaume, et il y eut des fêtes magnifiques et de grands festins.

Le premier jour, vers la fin du repas, la nouvelle mariée tira de sa poche deux charmantes petites grenouilles d'or et les posa sur une assiette d'argent devant elle. Alors, le dialogue suivant commença entre les grenouilles d'or, devant tous les convives silencieux et émerveillés :
- Ne te rappelles-tu pas, mon frère chéri, demanda la première, que, quand nous étions au château des magiciens, la magicienne, qui ne t'aimait pas, t'envoya un matin abattre un grand bois de chêne avec une cognée de bois, et que je vins à ton secours et te tirai d'embarras ?
- Je me le rappelle fort bien, ma petite sœur chérie, répondit la seconde grenouille.
- Ne te rappelles-tu pas, petit frère chéri, reprit la première, que la magicienne t'ordonna ensuite de construire un pont de plumes sur un bras de mer pour qu'elle y pût passer en voiture, et que je te tirai encore d'embarras ?
- Je me le rappelle bien, petite sœur chérie.
- Te rappelles-tu aussi, petit frère chéri, que quand nous primes la fuite du château du magicien, celui-ci nous poursuivit sur son dromadaire, et que, pour lui échapper, je changeai nos deux chevaux en fontaine et nous-mêmes en deux grenouilles d'or au fond de l'eau ?
- Je me le rappelles aussi, petite sœur chérie.
Tout le monde était attentif et silencieux, mais Arzur plus que tout autre. En effet, la mémoire lui revenait peu à peu de son passé, et il comprenait que le dialogue entre les deux grenouilles d'or retraçait sa propre histoire.
- Te rappelles-tu encore, petit frère chéri, reprit la première grenouille, que le vieux magicien nous ayant fait la poursuite une seconde fois, je changeai nos deux chevaux en deux arbres au bord de la route, et nous-mêmes en deux petits oiseaux qui chantaient sur les branches, et que nous lui échappâmes encore de cette façon ?
- Je me le rappelle bien, petite sœur chérie, répondit la seconde grenouille.
- Tu n'as donc pas oublié non plus, petit frère chéri, que la magicienne, furieuse, nous poursuivit à son tour sous la forme d'un nuage noir, avec accompagnement de tonnerre et d'élairs, et comment je sus aussi mettre toute sa science en défaut ?
- Non, petite sœur chérie, je ne l'ai pas oublié non plus.
Arzur, ne pouvant plus douter que la nouvelle mariée ne fût sa sœur et sa protectrice contre le magicien et la magicienne, se leva, alla à elle et l'embrassa tendrement en disant :
- Pardonne-moi, ma petite sœur chérie, je te dois la vie et je t'aime et t'aimerai toujours jusqu'à la mort.
Tout le monde fut touché de cette reconnaissance.
Le roi avait aussi une fille, la plus belle princesse qu'il fut possible de voir sous l'œil du soleil et il l'accorda volontiers à Arzur, et les festins, les jeux et les réjouissances publiques recommencèrent de pus belle et durèrent pendant un mois entier.
La trisaïeule de la bisaïeule de ma grand-mère était alors cuisinière à la cour, et c'est ainsi que s'est conservé dans ma famille le souvenir de tout ce que je viens de vous conter, et où il n'y a pas un seul mensonge, si ce n'est, peut-être, un mot ou deux.


François-Marie LUZEL, Contes populaires de la basse Bretagne, 1887.
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